Les cabinets d’analyse de marché, c’est toute une histoire. Souvent soupçonnés de ne pas être vraiment sérieux sur leurs données (un article du site Fortune a récemment étrillé les méthodes d’IDC), ces sociétés ressemblent à des augures modernes qui annoncent le sens du vent en soufflant bien fort dans la direction choisie. Pour la seconde fois, IDC vient d’être pris la main dans le sac à manipuler d’anciennes données pour « changer » les évolutions de croissance d’un marché : celui de la tablette.

En effet, selon IDC, la part de l’iPad a lourdement chuté le dernier trimestre, passant de 32% à 25% de Parts de marché…sauf que cette baisse provient directement de quelques petites manipulations « après-coup » qui cette fois ne sont pas passées inaperçues. Ainsi, en 2013, IDC publiait son compte rendu pour le second trimestre de l’année, et attribuait 14,6 millions de ventes à l’iPad (chiffres officiels publiés par Apple lui-même), 8,8 millions de Galaxy Samsung et 17,5 millions de tablettes dans la catégorie « Autres », qui regroupe des appareils sous marque blanche venant de Chine impossibles d’ailleurs à quantifier avec précision.

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Un an plus tard donc, IDC ressort ses données de 2013 pour établir une courbe de croissance des différents acteurs du marché, et c’est là que la supercherie intervient : dans ses derniers chiffres, les données de 2013 ont été modifiées à la baisse, donnant ainsi l’illusion que la croissance a été beaucoup plus forte du côté des concurrents d’Apple tandis que l’iPad chutait officiellement de 9% dans les ventes. Samsung était crédité de 8,8 millions de ventes en 2013 ?  pour la même période, il n’en a plus que 8,4 millions sur le tableau publié en juillet 2014; la catégorie « Autre » était forte de 17,5 millions d’unités en 2013 ? Elle perd comme par magie 1,1 million de ventes en 2014 (16,4 millions estimés pour 2013).

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Sans la « retouche » des chiffres de 2013, la part d’Apple serait légèrement au dessus des 30%, soit quasiment le même score que celui de l’an dernier

Mécaniquement, ces rabotements de chiffres gonflent artificiellement la croissance du marché, au détriment du seul fabricant qui publie des chiffres fermes, que l’on ne peut « tordre » d’une année sur l’autre. IDC s’appuie ici sur le fait qu’aucune autre société qu’Apple ne publie des chiffres officiels de ventes. Il lui est donc permis de fournir des estimations et même, on le voit ici, de les modifier un an après, là encore avec pour seul résultat qu’Apple semble perdre beaucoup plus de plumes que cela n’aurait été le cas en gardant inchangées les données de l’an dernier (peut-être d’ailleurs elles-même manipulées par rapport à 2012). SA, IDC et Gartner ont tous été pris à pratiquer ce genre de manipulation, dans le sens inverse parfois, pour par exemple minorer la baisse des ventes d’un concurrent d’Apple.

Sur le dernier trimestre, Strategy Analytics a ainsi réussit le tour de force de n’imputer que 1,5 millions de smartphones en moins pour Samsung, alors que le fabricant a publié un chiffre d’affaire en baisse de 20,5% sur sa partie mobile (les revenus, contrairement aux bénéfices, sont directement liés aux ventes « brutes » en magasin). Cette estimation de baisse des ventes, totalement surréaliste au vu de l’ampleur du « gadin » financier de Samsung, contraste avec la façon dont le même organisme semble traiter la part de marché d’Apple, que ce soit sur le secteur mobile ou celui des tablettes. A quand un audit de ces sociétés qui jouent souvent de leur influence sur les places boursières ? Il serait temps.