Les réactions ont été nombreuses depuis la présentation de l’Apple Watch (et surtout suite à la confirmation d’un éventail de tarifs allant de 399 à 18 000 euros). Malgré le scepticisme de beaucoup, et une fois n’est pas coutume, les investisseurs et analystes se sont plutôt montrés enthousiastes, un satisfecit quasi-général qui se fait entendre jusque dans les propos de certains acteurs de l’industrie horlogère elle-même. Ainsi, Elmar Mock, le co-fondateur de Swatch (tout de même…), est revenu sur l’Apple Watch dans les colonnes de Bloomberg, et sur son succès qu’il estime très probable : « Apple va réussir rapidement » déclare Mock sans embages; « Cette industrie (de la montre, Ndlr) a sous-estimé la puissance de feu d’Apple. » .

L’avertissement peut paraître prématuré, mais à la lumière de ce qui s’est passé suite à la présentation de l’iPhone, le contenu n’est pas forcément exagéré. Après tout, et il suffit de lire aussi de nombreux commentaires des forums qui suivent la même « pente », il n’est pas rare de lire que l’Apple Watch ne sera jamais considérée comme un produit de référence dans le secteur face à des montres, nous dit-on, qui prennent de la valeur avec le temps; et d’aligner certains poncifs sur une Apple Watch qui perdrait complètement de sa valeur au bout de 3 ans, serait inutilisable après le même laps de temps, et pour tout dire n’aurait rien en commun avec une bonne montre de « marque » à partir de 500 euros.

Elmar mock Elmar Mock, co-fondateur de Swatch

Le problème c’est que, comme à l’époque du smartphone, ce type de critiques brasse généralement quantité de poncifs sur le secteur qu’il prétend défendre. Les montres qui gagnent de la valeur sont le plus souvent les montres de luxe (plusieurs milliers voire dizaines de milliers d’euros à l’achat), pas les montres moyen/haut de gamme de certains fabricants dont les tarifs se situent entre 400 et 1500 euros. Entre les systèmes d’horlogerie qui ne sont plus réparés et pris en charge par manque de pièces spécifiques et la décote naturelle du marché, la plupart des toquantes achetées aux alentours des 1000 euros sont aussi celles que l’on retrouvera 10 ans plus tard sur les braderies, à quelques dizaines d’euros seulement.

Cette « idéalisation » du secteur de l’horlogerie, prégnant dans nombre de commentaires dits « sceptiques », se double aussi souvent d’une bonne couche de mauvaise foi, ne serait-ce que l’oubli de la finition vraiment haut de gamme de la toquante d’Apple, qui n’a bien sûr rien à voir avec les bracelets Casio auxquels elle est parfois comparée (pour en dénier la valeur bien sûr), se situant même clairement du coté de la montre haut de gamme, voire même pour certains détails, du luxe. Quant à la durée de vie de l’Apple Watch, sans information précise sur le programme de remplacement des batteries, cela n’a pas vraiment de sens de la limiter arbitrairement à 2 ou 3 ans. Après tout, nombre d’iPhone de seconde ou troisième génération (donc datant d’au moins 5 ans) servent encore…

applewatch

Une finition clairement haut de gamme, sur laquelle Tim Cook est longtemps revenu lors de la keynote

Rajoutez à cela une certaine morgue d’une industrie horlogère (trop ?) fière de ses acquis (et qui oublie un peu vite la crise générée par l’arrivée des montres à quartz), et l’on ne s’étonnera finalement pas d’entendre Elmar Mock déplorer l’attitude de l’industrie horlogère suisse dans son ensemble : « Nous avons vu beaucoup d’arrogance dans l’industrie suisse de la montre ces dernières années, jugeant les montres connectées comme des gadgets et ne pas les prendre au sérieux « . L’avertissement sera t-il entendu ? Pas sûr…