Le cours de l’action Apple est irrésistiblement attiré par les profondeurs, et les mille milliards de capitalisation semblent presque n’avoir été qu’un mirage. A la fermeture vendredi soir, AAPL a terminé à 150,73 dollars, après même être descendu à près de 149 dollars ! Hors cotation, l’action a encore perdu quelques plumes, à 150,10 dollars. Au mois d’octobre, AAPL valait encore 233 dollars, ce qui signifie qu’Apple vient de subir un gadin monumental de 36% en bourse en moins de trois mois. Cette chute inédite laisse un certain nombre d’analystes pantois, la valeur du cours ne semblant plus corrélée avec les résultats bruts de l’entreprise. Apple bat en effet des records de chiffre d’affaires et de bénéfices, et devrait terminer l’année à la 6ème place du classement Fortune 500 (les 500 plus grosses sociétés dans le monde).

AAPL s’est effondré en bourse en moins de 3 mois; l’action Apple a perdu 36% de sa valeur et pointe désormais à 150 dollars

Les analystes anticipent pour la plupart une baisse des ventes d’iPhone, mais au pire, cette baisse envisagée ne dépasse pas quelques pourcents, ce qui là encore ne colle pas avec l’amplitude de la claque boursière. Tout se passe en fait comme si les investisseurs étaient persuadé qu’Apple n’avait plus aucune bille en main : hors l’iPhone, point de salut ! Les technologies AR ? Trop lointaines ? L’Apple Car ? Plus un fantasme qu’une réalité tangible; sans compter bien sûr la critique, sans doute plus justifiée celle-là, concernant les tarifs très élevés d’Apple. Apple n’a pourtant jamais autant investi dans la R&D et la nomination de Giannandrea au poste de SVP Machine Learning and AI Strategy  est un signe fort qu’Apple prend (enfin ?) l’IA très au sérieux (avec déjà des résultats notables sur Siri). L’IA ne deviendrait-elle donc stratégique que lorsque Facebook ou Google s’en préoccupent ?

Apple Watch : un énorme succès… qui n’intéresse plus vraiment Wall Street; la montre connectée avait pourtant le vent en poupe quand FitBit dominait le marché

A moins de considérer qu’Apple va s’arrêter demain de sortir de nouveaux produits, que les petites phrases de Tim Cook sur la AR ne sont que du bluff (mais qui peut le croire sérieusement ?), que l’embauche de pontes de Tesla n’a rien à voir avec une voiture autonome, ou que Giannandrea n’est là que pour roupiller jusqu’à sa retraite, il semble difficile de considérer que la firme californienne n’a aucune perspective de croissance (au moins à moyen terme), même si ces nouveaux horizons ne se dégageront sans doute pas dès l’an prochain (ce qui est aujourd’hui la seule quasi certitude). Certes, Apple est dépendant de l’iPhone… comme Facebook est dépendant de Facebook, comme Google est dépendant de son moteur de recherche, comme Microsoft est dépendant de Windows et de sa suite Office. So What ?

L’arrivé de Giannandrea et la progression de Siri semblent indiquer qu’Apple a cette fois pris le train des technologies IA; pas suffisant pour les investisseurs 

Craint-on réellement pour la survie de l’éco-système d’Apple ? Mais plus d’un milliard de personnes utilisent aujourd’hui un terminal sur iOS (et près de 100 millions un Mac); le « too big to fail » n’est-il là encore qu’un adage seulement valable pour Google, Facebook et Microsoft ? Ce n’est tout de même pas comme si Apple comptait ses clients dans un sac de billes… Ce n’est pas non plus comme si Apple n’enregistrait que des échecs : les ventes d’iPhone sont restées stables à un très haut niveau en 2018, les ventes d’Apple Watch explosent, les services aussi (Apple Pay, App Store, iTunes, Apple Music), et le partenariat entre Apple et IBM fait des merveilles dans le secteur Pro. Mais décidément rien n’y fait. Les perspectives sont moroses pour l’iPhone ? Alors entonnons tous en chœur : « Apple is doomed ! » Les analystes y croient-ils VRAIMENT ou jouent-ils à se faire peur ?

Dans ce brouhaha en mode « panique », quelques voix tentent de faire entendre leur différence, mais ces dernières sont noyées dans un concert de longues plaintes catastrophistes qui prennent parfois de petits airs revanchards. Tout cela ressemble furieusement à la période d’avant l’iPhone, quand les ventes d’iPod commençaient à piquer du nez et que nombre d’analystes estimaient alors que les rumeurs sur un mobile Apple n’étaient forcément que du vent; on connait la suite. Les évènements passés ne devraient-ils pas  inciter à plus de circonspections ? Visiblement, ce n’est plus le cas.