« Il y a quelque chose de pourri au Royaume de Danemark » écrivait Shakespeare; et nous pourrions sans doute faire de même, avec quelques variations néanmoins, du style : »Il y a un ver dans la pomme » ou bien « la pomme est-elle trop mûre ?« . Car quelque chose cloche ces temps-ci chez Apple. Pas des choses graves à première vue ou au contraire, trop souvent, des choses vues et revues…; sauf que cette fois, ça ne passe pas, ça ne passe plus.

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Une pomme trop mûre…

Sur le fond,il y a ce sentiment étrange que l’on a fini par s’habituer à ce qui n’aurait jamais dû être habituel, ou pire, devenir banal. Par exemple, la manière dont Apple gère la stratégie commerciale de sa gamme Mac. On ne s’étonnait même plus que le calcul du tarif européen des Mac ne suive aucune logique propre; on avait beau rajouter au prix en dollars la taxe US tournant aux alentours des 8%, retrancher ce qu’il fallait de nos 20% de TVA pour se placer au même niveau, puis faire jouer derrière la conversion euro/dollar, le compte n’y était plus.

iMac Retina 4K 5K

Superlatifs, mais petites radineries…

It Works…When It Works…

Et puis, il faudrait aussi parler un peu des fameuses radineries d’Apple, les cartes graphiques anémiques sur des ordinateurs vendus à plus de 2000 euros, la RAM soudée des iMac 21 pouces avec obligation de passer par le site d’Apple pour quelques barrettes de RAM supplémentaires à la commande facturées au prix du lingot d’or, ou bien encore, plus pernicieux, la réduction de la capacité de mémoire flash livrée avec les disques de stockage Fusion Drive de capacité 1 TB (les « moins chers » des disques Fusion Drive). Ceux qui commanderont pour leur prochain iMac un disque Fusion Drive 2 ou 3 TB auront toujours à leur disposition 128 GB de mémoire flash en sus du disque dur « traditionnel », mais si l’on décide de se contenter du Fusion Drive « de base » à 1 TB, la mémoire flash passe alors à 24 GB seulement, ce qui peut même s’avérer inférieur à la capacité en RAM de certains iMac. Le choix d’Apple est tellement absurde que le californien s’est senti obligé de préciser aux utilisateurs d’iMac disposant de 32 GB de Ram ou plus qu’il vaudrait mieux choisir l’option du Fusion Drive à 2 ou 3 TB pour des performances optimales. Si même Apple le dit…

MacBook Gris Sideral

Des produits d’appel facturés au prix fort

En fait, depuis quelques temps, on a la très nette impression que certains produits d’Apple ne sont là réellement que pour servir d’appel d’air au produit situé sur la gamme tarifaire au dessus; les 16 GB de l’iPhone 6s « premier prix » ou bien les Fusion Drive 1 TB des iMac sont clairement là à cause de décisions qui n’ont de sens réel que si l’on suppose que cela peut en effet inciter l’utilisateur à regarder le modèle au dessus (qui ne subit pas ces limitations ou ces pingreries). Tout autre justification renverrait simplement à de la stupidité, ou peut-être à la volonté de se montrer sadique avec ses propres clients, ce qui n’est sans doute pas la « bonne » explication ici.

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Des utilisateurs passifs

Mais à vrai dire, ne sommes nous pas à blâmer, nous utilisateurs, dans cette façon de plus en plus horripilante qu’a Apple d’avancer des pions qui laissent entendre que les grandes décisions commerciales se font hors de toute préoccupation réelle des clients ? Pourquoi avoir laissé ces « radineries » devenir presque des sujets de « folklore », alors qu’un minimum de recul ne les rend franchement pas plus acceptables aujourd’hui qu’hier (et même sans doute moins acceptables dans un contexte de grandes difficultés économiques pour beaucoup et alors même qu’Apple est assis sur un tas d’or de 200 milliards de dollars) ? Craignons nous que le fantôme de Steve Jobs vienne nous pincer la plante des pieds si nous arrêtons soudain de feindre une indifférence lasse face à des pratiques qui sont à l’extrême opposé de l’image « bienfaisante » qu’Apple véhicule dans ses publicités ?

Du « folklore » à l’anomalie

Qu’on se le dise une bonne fois pour toute : les valses d’étiquettes au prix fort, les machines haut de gamme proposées avec certains composants clefs largement en dessous des standards, et bien sûr toutes les « radineries » ne visant parfois qu’à grapiller quelques dizaines de dollars, tout cela n’est pas une « particularité » de la marque que l’on devrait toujours finir par prendre avec le sourire, mais bel et bien une anomalie, à laquelle Apple a fini par s’habituer parce que nous nous sommes (trop) habitués avec lui. Et le pire est bien ici qu’Apple semble ne pas se rendre compte que ces décisions encore une fois absurdes laissent un boulevard à une concurrence qui est montée d’un bon niveau (il suffit de voir les dernières annonce de Microsoft).

Tim Cook Charlie Rose Interview

Attention à l’ivresse des hauts sommets

Car le manque d’audace technologique sur la gamme Mac depuis quelques trimestres est d’autant plus souligné par toutes ces « scories » qui irritent l’acheteur potentiel; le client d’iPhone pourra lui toujours trouver de bonnes raisons de « passer l’éponge » sur certaines décisions étranges d’Apple : l’éco-système iOS et les accessoires, des atouts technologiques réels (puce Ax maison avec un GPU surpuissant, intégration rapide de nouvelles technologies efficaces comme le Touch ID ou le 3D Touch, etc…) suffisent souvent à « compenser » cette impression désagréable que cela « pourrait être encore mieux ». Mais concernant le Mac rien ne vient vraiment compenser « tout ce qui cloche« , et pourtant Apple agit comme s’il n’avait jamais à rendre d’autres comptes qu’aux chiffres de vente, quitte à avancer comme un bulldozer : un seul port USB-C sur le MacBook ? On avance…La RAM ultra-chère ? On avance, et le sourire de Tim Cook en prime… Comme si aucune critique n’avait de prise, comme si, tout simplement, Apple avait pris la grosse pomme, la très grosse pomme avec sa gamme Mac; mais le problème des grosses pommes, c’est qu’elles offrent plus de prise au vent, et un avis de tempête est si vite arrivé…