Google vient d’annoncer le lancement américain du Google Play Pass, un service par abonnement à priori très proche d’Apple Arcade : 350 apps disponibles – principalement des jeux – pas de publicités ni d’achats intégrés, 6 utilisateurs maximum sur un seul abonnement (famille) et un tarif identique là encore au service d’Apple (4,99 euros/mois). Vu d’un peu loin, Google Play Pass serait donc un calque d’Apple Arcade, et parviendrait même à faire beaucoup mieux en volume (350 apps « Play Pass » contre 71 jeux « Apple Arcade »).

Les jeux présents autour du logo Google Play Pass sont déjà tous disponibles sur iOS, parfois depuis plusieurs années

Mais un détail suffit à changer radicalement la donne : Google n’impose en effet aucune exclusivité à son service; les jeux disponibles dans Play Pass pourront aussi être portés sur iOS. En fait, c’est déjà le cas pour l’ensemble du catalogue « jeu » de Play Pass; le fameux line-up de lancement est intégralement composé de titres déjà disponibles sur iOS et Android, souvent depuis plusieurs années. Corolaire de cette ouverture, le service de Google ne propose aucune nouveauté mobile, très peu de jeux vraiment récents, et bien sûr, aucune exclusivité.

En face, Apple Arcade dispose d’un catalogue composé à 100% de nouveautés mobiles , et parfois même des jeux totalement exclusifs au support (que l’on ne trouve donc même pas sur console ou PC). Comparer Play Pass à Apple Arcade apparait comme un non-sens en terme de contenus: cela revient à comparer un service comme HBO (contenus exclusifs) à un service de SVoD qui ne proposerait que du fond de catalogue. Le fond de catalogue, ce n’est pas forcément un mal, et après tout, il y a des chefs d’oeuvre du 7ème art à toutes les époques, mais ce n’est tout de même pas la même chose que des productions récentes et exclusives. Ainsi, Star Wars Kotor est toujours un chef d’oeuvre sur Play Pass (et sur iOS), mais cela reste finalement du rétrogaming (le jeu date de 2003) dont le niveau de réalisation technique se situe aujourd’hui bien en deçà de celui d’un Oceanhorn 2 ou d’un Shinsekai sur Apple Arcade.

Autre commentaire souvent entendu depuis l’annonce du Play Pass: le service de Google rendrait Apple Arcade de facto moins attractif pour les développeurs, du seul fait que les jeux Apple Arcade ne peuvent pas être portés sur Android. Mais cet « argument » découle d’une (très) mauvaise connaissance de l’économie des apps sur mobile. Car en moyenne, les jeux payants engrangent 80 à 90% de leurs revenus sur iOS, au point que nombre de studios ont abandonné Android; ce n’est pas un hasard si des studios aussi réputés que Motion Twin (Dead Cells) ou Thatgamecompagny (Sky, Journey) désertent la plateforme au petit robot vert.

C’est en fait Google qui a tout à prouver avec son Play Pass : Android est grevé par un piratage devenu endémique, et le Google Play Pass apparait comme le dernier recours permettant de rémunérer un tant soit peu les développeurs qui ont le courage de se lancer sur la plateforme. A côté, Apple Arcade répond avant tout à une stratégie éditoriale : proposer du contenu neuf et de qualité dans un service centralisateur et visible par tous.

A 2 dollars/mois la première année, et au vu du très grand nombre d’apps déjà disponibles (350), les studios récolteront forcément de (bien) plus petites miettes sur Play Pass que sur Apple Arcade lorsqu’il s’agira de partager les revenus générés par le service… à moins qu’un gros pourcentage d’utilisateurs Android ne se décide à basculer massivement vers un abonnement payant; très peu probable, même à 2 dollars/mois, s’agissant d’utilisateurs habitués à piocher dans du gratuit depuis plusieurs années (piraté ou non). Même avec le Play Pass, les studios qui privilégiaient déjà iOS ont donc peu de chances d’être vraiment « séduits » par la nouvelle offre de Google.