La justice impose une médiation entre la start-up française Spliiit et les géants américains du streaming. Cette plateforme de partage d’abonnements fait face aux attaques juridiques d’Apple, Netflix et Disney depuis 2021.

Spliiit Apple

Le partage d’abonnements dérange Apple et d’autres

Spliiit propose depuis 2019 de partager les frais d’abonnement entre inconnus. Les utilisateurs peuvent diviser le coût d’un compte Apple (Apple Music, Apple TV+, iCloud, etc), Spotify ou Netflix en mettant en relation « vendeurs » et « acheteurs ». La plateforme prélève une commission sur chaque transaction. Cette offre couvre environ 300 services dans la musique, la vidéo, le jeu vidéo, l’informatique et la presse. Spliiit revendique la légalité de son modèle « tant que l’utilisateur respecte les règles d’utilisation des plateformes ».

Apple, Netflix et Disney contestent cette approche. Regroupés au sein de l’Alliance for Creativity and Entertainment, ils ont assigné Spliiit en décembre 2021 pour contrefaçon de marques et violation des conditions générales d’utilisation. Les entreprises américaines dénoncent un « trouble manifestement illicite » et invoquent la concurrence déloyale. Elles pointent que leurs conditions générales d’utilisation (CGU) limitent le partage d’identifiants aux personnes du foyer ou de la famille.

Spliiit riposte en invoquant la « référence nécessaire », exception permettant la reproduction d’une marque pour informer le public. La start-up souligne également les imprécisions des CGU concernant les notions de « foyer » et « famille ».

Des interprétations contradictoires

Les constats d’huissiers révèlent des pratiques surprenantes. Le service client de Disney+ tolérait le partage avec des collègues, donc des tiers. Chez Netflix, le service client interprétait la clause « foyer » de manière permissive, autorisant le partage avec des personnes non apparentées et résidant ailleurs. Apple autorisait déjà le partage avec cinq autres personnes sans précisions supplémentaires selon l’ordonnance judiciaire.

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Face à cette complexité, le tribunal judiciaire de Paris avait invité les parties à se pourvoir au fond en avril 2024. Désormais, la justice impose une médiation avant l’audience prévue d’ici fin 2025, comme le révèle L’Informé.

Jonathan Lalinec, PDG de Spliiit, affiche sa confiance : « Beaucoup de choses ont évolué depuis le début de cette affaire du côté de Disney et Netflix notamment puisque ces plateformes ont mis en place des options de partage sans utiliser l’expression de foyer, par des formules d’abonnés supplémentaires ».

La start-up a adapté sa communication depuis 2020. Elle utilisait auparavant des marques semi-figuratives avec les logos des services, se limitant désormais aux seuls noms. Jonathan Lalinec reconnaît que « cet usage passé des marques semi-figuratives, sans leur accord, est la seule chose qui peut rester dans la médiation ou le procès ».

Un modèle économique défendu

Spliiit revendique 1,6 million d’utilisateurs cumulés en Europe, dont 1 million en France. La plateforme compte environ 320 000 abonnés payants et près de 100 000 propriétaires d’abonnements (c’est-à-dire ceux qui partagent leur abonnement).

Le dirigeant défend son impact positif : « Notre taux de résiliation est six fois plus faible par rapport à ces offres en direct. On devient donc un outil pour toutes les plateformes d’abonnements qui essayent de minimiser leur taux de résiliation ».

Le PDG se dit prêt à négocier, précisant que de tels accords existent déjà avec plusieurs plateformes françaises. La médiation pourrait ouvrir la voie à une coexistence entre le modèle Spliiit et les exigences des géants du streaming.