Dans le quartier animé de Huaqiangbei à Shenzhen en Chine, un bâtiment discret, le Feiyang Times, s’est forgé une réputation sulfureuse. Surnommé « le bâtiment des iPhone volés », il est devenu, selon une enquête du Financial Times, un carrefour majeur du trafic international de smartphones dérobés. Ce marché, alimenté par des réseaux criminels organisés, illustre la complexité et l’ampleur d’une industrie illégale en pleine expansion.

iPhone 16 Pro vs iPhone 16 vs iPhone 16e Arriere

L’histoire de Sam Amrani, un entrepreneur technologique londonien, est révélatrice. Après le vol de son iPhone 15 Pro par deux hommes à vélos électriques dans les rues de Londres, il a suivi sa trace grâce à l’application Localiser d’Apple. Le téléphone a d’abord transité par un atelier de réparation à Londres, puis par Hong Kong, avant d’atterrir à Huaqiangbei. « C’était très rapide, très organisé et presque ciblé », a confié Sam Amrani.

Ce parcours, qui s’étend sur des milliers de kilomètres, met en lumière une logistique sophistiquée. Selon les autorités londoniennes, le vol de téléphones représente une industrie criminelle pesant 50 millions de livres (59,2 millions d’euros) par an, une tendance en hausse également observée à Paris et New York.

Un passage par Hong Kong

Le quatrième étage du Feiyang Times est particulièrement connu pour la vente d’iPhone d’occasion en provenance des pays occidentaux. Si certains appareils proviennent de reprises légitimes, des vendeurs reconnaissent que même les téléphones verrouillés à distance trouvent preneurs, à un prix de marché spécifique.

Hong Kong joue un rôle clé dans cette chaîne. À Kwun Tong, un bâtiment industriel situé au 1 Hung To Road abrite des centaines de grossistes qui proposent ouvertement des iPhone étiquetés « verrouillés par iCloud » via des plateformes de messagerie. Un vendeur basé à Shenzhen, en visite à Hong Kong, a expliqué : « Les [téléphones verrouillés par mot de passe] ont probablement été volés aux États-Unis. Ils sont vendus à Hong Kong, puis acheminés vers d’autres pays, y compris au Moyen-Orient ».

Un marché lucratif pour les pièces détachées

Ce qui rend Huaqiangbei si attractif pour les voleurs, c’est son marché spécialisé capable de valoriser chaque composant d’un iPhone, des écrans aux circuits imprimés en passant par les puces. Même un appareil verrouillé, inutilisable en l’état, reste rentable une fois démonté. Les victimes de vols reçoivent souvent des messages de personnes basées à Shenzhen, qui les incitent, parfois avec des menaces, à désactiver la fonction Localiser. Une telle désactivation augmenterait considérablement la valeur de revente de l’appareil.

Hong Kong, grâce à son statut de port franc exempt de taxes à l’importation, facilite ce commerce illégal. Les téléphones volés transitent par la ville avant d’entrer en Chine continentale, évitant ainsi les lourdes taxes sur les produits électroniques. Pour leur part, les autorités hongkongaises ont indiqué qu’elles « prendront les mesures appropriées si nécessaire, en fonction des circonstances et conformément à la loi ».